06 janvier 2016

La tendresse de sa cerise




(La "tendresse" :  J'ai appris par la télé, grâce à Ferrero et ses Mon Chéri, que la cerise avait de la "tendresse". L'autre jour, c'était mon boucher qui attribuait de la "tendresse" à son entrecôte. Dans ce monde de fous, seule la tendreté nous sauvera de la noiritude.)

J'avais tant de choses à dire, tant de bonnes idées pour alimenter cette Mie qui va (déjà !) sur ses dix ans !
Au milieu des anecdotes poilantes et des aphorismes plaisants, se sont pointées les catastrophes de l'actualité et des turbulences personnelles… D'un effroi à l'autre, l'époque nous gâte ! Je me suis retrouvé naviguant quasi dans le huitième continent des poubelles, sans bras ni jambes ! 
J'ai pleuré, c'est vous dire. J'ai pleuré plusieurs fois, moi qui suis un vrai dur. Et écrit plein de lignes très-pertinentes, déjà caduques, car le sang sèche vite en entrant dans l'Histoire, comme disait l'autre (1) !
Il ne reste entre mes doigts (qui vont très mieux, merci !) que l'écume de mille petites choses, que je vous livre en vrac, chers faux lovers…

1. Quel joli début d'année :

Un monde où l'on revend ses cadeaux, sans honte, 
et parfois complaisamment devant les caméras de TF2, 
me rappelle définitivement (definitely
que l'époque est résolument moderne (unashamedly modern) ! 
Il te plaît pas, ton cadeau ? Donne-le aux pauvres et ferme-la, pauvre conne (bloody idiot) !

…Un monde où Fessebouc, votre réseau préféré, censure La Petite Sirène de Copenhague pour "contenu à caractère sexuel" et même en général "les seins des femmes"… (Seraient pas un peu obsédés, les Amerlocains ?)… puis rectifie le tir avec des histoires de "droits d'auteur", car des requins héritiers rôdent ! 
(Serait pas obsédé par le fric, ce monde ? Même le lien de mon dernier post pointant sur un très vieil enregistrement de Mon cul sur la Commode ne pointe plus "pour atteinte aux droits d'auteur"!)…  

Sirènes


…Un monde où un musée (le Rijksmuseum d'Amsterdam) rebaptise les œuvres d'art pour édulcorer les titres de termes jugés offensants (Nègre, nain, sauvage, mahométan)… Bientôt, on va remplacer "amuse-gueule" par "amuse-bouche" !!! (Que dis-tu, rossignol, oiseau de bon augure
(2) ? C'est déjà le cas ? Mais alors, aussi "croissant", qui est une viennoiserie moqueuse sur les Turcs ? Et que vais-je tremper dans mon jus dimanche ?)
Culs-de-lampe

…D'ailleurs, le monde est forcément moderne, puisque je reçois quotidiennement sur mon portable et mon ordi 28 propositions de mises à jour (updates)…

2. Expos

Vu l'expo intitulée "Qui a peur des femmes photographes ?". Outre que je ne comprends pas vraiment le concept (mais de quoi aurait-on peur ? sinon d'oublier de surfer sur un thème racoleur…), ce que j'y ai vu semble au contraire entériner cette "peur" supposée : les photos "de femmes" n'ont ni plus ni moins d'intérêt en elles-mêmes que les photographies de mâles.

Vu l'expo Lucien Clergue au Grand Palais : plein de belles cartes postales, pas mal de jolies choses, une petite poignée de chefs d'œuvre… Mais une ambiance genre hall de gare (3) assez désagréable. Avec en prime une odeur de poisson pané (fish fingers) venue sans doute du restau du musée (?)

J'allais oublier Kuniyoshi, le démon de l'estampe (japonaise) au Petit Palais. Superbe. Jusqu'au 17 janvier, faut se magner la rondelle.

3. Cinéma

J'ai revu Blue Jasmine de Woody Allen, et je me suis régalé (I really enjoyed). A ceci près que les derniers films de Woody ont tous une dominante jaune orangé très instagram que je ne m'explique pas : lui a-t-on greffé des cristallins trop bleus (-jasmin) ?

J'ai revu Le Mécano de la "General" (The General, 1926), de Buster Keaton : chef d'œuvre ! Chef d'œuvre ! 

J'ai enfin visionné (serait temps !) M le Maudit (M, Eine Stadt sucht einen Mörder, 1931). Etonnante modernité et inventivité du filmage, Peter Lorre qui en fait des caisses — mais on sort juste du muet — et Peer Gynt à tous les étages ! En revanche, l'allusion au nazisme montant, pointé par certains, m'a parfaitement échappé !

4. Musique

Je suis très pointu en box office (guichet). Aussi viens-je de découvrir un artiste majeur de la chanson (si si : 537 000 exemplaires vendus en 2014) mais qui m'avait échappé, un certain Kendji Girac. Tu connais ?
Extrait : 
"Toi ma belle Espagnole
Quand tu bouges tes épaules".
Quand je pense que j'avais ignoré quelqu'un qui fait rimer "espagnole" et "épeule"… Je l'ai toujours dit : c'est le décalage, la transgression qui fait l'art, et pas la conformité. CQFD !
Vous souvenez-vous du titre flamboyant de Françoise Hardy en 1962 : "C'est à l'amour auquel je pense"

A propos de chanteurs, j'ai eu toutes les peines du monde à trouver le nom des compositeurs (et des auteurs parfois) du regretté Michel Delpech, quand on sait le succès de certains titres comme Laurette ou Wight is Wight (musiques de Roland Vincent). Il y eut également J-Jacques Debout, Pierre Papadiamandis (Pour un flirt, Marianne), Michel Pelay (Le Chasseur, Le Loir-et-Cher), Claude Morgan, etc. J'aime bien remettre les chaussures à leur pied et faire hommage aussi aux talents de l'ombre.

5. Lettre au Père Noël

Alors pour l'année prochaine, petit Papa Noël, j'aimerais formuler quelques souhaits :

Délivre-nous des marchés de Noël, où l'on vend de la camelote dans des chalets savoyards en contreplaqué ! Sauf celui de Strasbourg à cause du kouglof et du vin chaud. Et encore.

Délivre-nous des comiques et des standeupes niaiseux (stupid seuls-en-scène) sur les chaînes de ma box avec leur festivals de Liège, de Montreux et de Pétaouchnoque ! Profites-en pour éloigner aussi Stéphane Guillon et Gaspard Proust et remplace-les par des humoristes.
Un atome public


6. Le quart d'heure liturgique

Pendant que j'en suis aux prières, peux-tu négocier avec les hautes autorités que tu dois croiser avec ton traîneau, deux ou trois petites rectifications au Notre Père (Pater noster) officiel, je veux dire celui adopté en 1966 mais qui me paraît comporter quatre bizarreries qui m'agacent :

…"Donne-nous aujourd'hui notre pain de ce jour" : ???
Autant le "notre pain quotidien" de l'ancienne version pouvait se concevoir — "N'oublie pas mes petits souliers aujourd'hui" — autant ce pain "de ce jour" m'interloque un poil, car il me paraît une revendication tautologique quasiment offensante à l'égard du Très-Haut. Autrement dit "Fais gaffe qu'il soit pas rassis" ?

…"Comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés". Pléonasme, sortez des rangs : le comme veut déjà dire aussi ! Eh ! Il est sourd à ce point-là ?

…"Ne nous soumets pas à la tentation" a remplacé "Ne nous laissez pas succomber à la tentation". Ici, le pécheur devient exigeant : non seulement il ne saurait résister, mais en plus il préfère n'y être point soumis ? Trop facile !

Et comme une incohérence ne vient jamais seule, "Amen" s'est substitué à "Ainsi-soit-il". 
Amen

Je dis ça je dis rien, moi je fréquente plus, c'est juste pour aider les camarades croyants. S'il en reste…

7. Méditation sur la merlitude des choses pour terminer sur un truc un peu plus goulu

Merle alors
Et je regarde le nid, le vrai nid en vraie paille qu'une merlette un jour avait fabriqué sur mon balcon, une certain printemps enchanté, habité toujours par deux œufs bleu pâle qui n'avaient pas éclos. Je me dis que cette architecture exquise purement programmée par la nature est un miracle. Comme la toile calibrée d'une araignée. Comme un milliard de choses. Pourquoi s'étonner de ce miracle et qu'y a-t-il de si extraordinaire ? C'est harmonieux du simple fait que cela est. Pas compliqué. Et que notre mesure du Beau se fonde précisément sur ce qui préexiste. N'est-il ? (doesn't it ?)

La prochaine fois, je parlerai de sexe, ça changera.

Car

N'oubliez pas que

La petite nonne aime les grands bœufs.

Votre dévoué 
Devil à mots

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Notes :
1. Jean Ferrat (Nuit et Brouillard, 1963)
2. Gianni Esposito (Un Noble rossignol, 1968)
3. Jacques Higelin (Je veux cette fille, album Alertez les Bébés, 1976)