06 novembre 2013

Trompettes, poils, bonnets et bolets.




En ces temps de pluie et de douceur automnale, 
les champignons sont partout ; 
c'est le moment de se régaler de trompettes, 
girolles et autres bolets. 
Cela dit, on n'est pas dans un blog gastronomique, 
mais culturel. 
Cultivons :


La vie d'Adèle
Une histoire d'amour avec du poil autour 
(et de la morve)


Surtout de la morve, d'ailleurs, sous le museau de lapin de l'exquise Adèle Exarcopoulos…. 
Et des larmes. Car le poil se fait rare, ces temps-ci, chez les jeunes filles. Même dans le cinéma d'auteur.
Abdellatif Kechiche parle des jeunes filles comme personne — on l'avait déjà remarqué dans l'Esquive. De leurs amours toutes neuves, de leurs doutes, de leur incommensurable connerie entre copines (ni plus ni moins que les garçons, je précise).
Il a un art de capter les tremblements du vivant absolument unique. Si je voulais faire un mot facile, je dirais que ce serait comme du Lelouch qui aurait du contenu. Car les mouvements de l'âme chez Kechiche, c'est pas du shabadabadah. Ce serait plutôt le Grand Huit. Mais vu du dedans, avec les douceurs, les ferveurs, les humeurs et les palpitations. On est d'abord surpris de la crudité assumée et voyeuse des scènes d'amour. Et puis, sortant du film, on se sent comme rechargé, délivré de notre rassurante pruderie : l'amour c'est brutal, désordonné, tonitruant ; ça mouille et ça clapote, et après ça fait pleurer. Pas toujours besoin de sortir la grue à travelling et les violons. 
Kechiche, lui, il sort quand même son Marivaux, une fois de plus : "Je suis une femme. Pense-le avant de le lire", conseille le prof. 
Et puis il y a le contexte : la famille où l'on mange des huîtres, et celle où l'on fait des spaghettis bolognèse. On pourrait lui reprocher d'être schématique, mais pour qui connaît un peu le monde… D'ailleurs est-il plus important d'écrire son roman que de faire prof des écoles ? Je le trouve plutôt malin, Kechiche, sur  ce qu'on pourrait appeler le Goût des Autres, en référence à la jolie comédie des Jaoui-Bacri. Malgré quelques dialogues un peu convenus (notamment sur l'art).
Film à voir pour son culot, son érotisme, son style, et ses actrices formidables. Adèle en premier. Et il n'y aura plus qu'Eric Neuhoff, qui a perdu son cœur et qui est critique au Figaro, pour trouver qu'après tout c'est l'histoire de deux gourdiflottes de province et que les scènes sont trop longues.





Dans mon petit panier à vocabulaire

Merci à Agnès, chère copine suisse qui vient d'y déposer CONTROLLING, MOBBING, mais surtout les superbes FORTUITUDE et SÉRENDIPITÉ, nouvelles appellations (non encore avalisées par les dicos) qui font déjà un tabac dans les séminaires. 
Exemples :
— Madame Pichegru, est-ce que par fortuitude vous pourriez me peser une demi-livre de sérendipité ?
— Ah ben j'en ai pu, mon pauv'meussieur. Depuis que les avions QATARIS atterrissent sur le TARMAC (c'est France 2 et France 3 qui disent comme ça ; maintenant les avions, ils atterrissent sur les aires de stationnement !), j'ai reçu que des HASHTAGS. Ça vous ira ou s'il vous faut des DIÈSES ?
Note du blogueur : pour une fois qu'on avait un joli mot qui chantait (dièse), on a préféré la formule qui fleure l'armée teutonne ! Hashtag ! Cela dit, ce dièse n'est pas un vrai dièse, mais un signe typographique # qui veut dire "numéro". Et toc ! Quant aux Qataris, non seulement ils s'assoient sur les droits de l'Homme, mais en plus ils s'assoient sur l'orthographe ! Depuis qand ne met-on pas de u en français après un q ? 



Délation virtuelle

"Terre des Hommes" vient de se faire remarquer en piégeant des internautes avec une petite fille virtuelle qu'ils ont fabriquée. Comme ça, on peut avoir le nom et l'adresse des pédophiles qui ont mordu à l'hameçon. Je suggère d'étendre l'expérience à tous les "nolife" qui s'amusent à zigouiller dans les jeux vidéo des centaines de créatures tout aussi virtuelles sans être inquiétés. Je me propose même de faire parvenir à cette ONG les coordonnées de plusieurs de ces malencontreux, parmi les enfants de mes ami(e)s. 

Ecobonnets

Si j'ai bien compris, quelques patrons bretons ont fait reculer le gouvernement pour continuer d'avoir le droit de polluer gratuitement avec leurs camions pourris. Et ils sont devenus les héros du combat contre le grand méchant fisc ! C'est ça ou je me trompe ? Cela dit, "l'écotaxe" et la punition en général ne sont pas forcément les solutions les plus malines, même si c'est tout ce qu'ont trouvé les écolos. Mais là, quand même, je trouve que la manipulation des médias a été fort intelligemment orchestrée. Il est vrai qu'ils ne demandent que ça !

Les marchands

Il paraît qu'il faut payer, maintenant, pour regarder le moindre match de foutchebôl à la télé ? Ça ne passerait plus sur les chaînes "gratuites" ? Personnellement je n'en ai pas grand chose à taper, mais si j'étais vous, je me plaindrais. Déjà qu'en dehors d'Arte et des chaînes publiques, les films sont scandaleusement saucissonnés (mais comment ça peut-y être autorisé, ça ????), déjà que le moindre extrait sur Youtioube est précédé d'une réclame pour les yaourts, déjà que les hebdos dégueulent de pubs moches, déjà que le métro et les gares nous agressent d'écrans insupportables, déjà que ma boîte courrielle est inondée de spams… Les marchands sont déjà sur nos genoux. Et l'amour, dans tout ça ?

Zoa
Sabrina a refait sa zone au théâtre La Loge. On a beaucoup aimé le très singulier "Corps de Ballet" de Mohamed El Khatib, ainsi que l'expérience douce et forte du groupe nu de la "performeuse" Enna Chaton, "Je me sens maladroit(e)". Par ailleurs, Stéphanie Lupo ("C'est la fin") confirme son talent électrique ! (J'ai traduit les titres en français, vous me connaissez…)
On attend la prochaine Zone ; je dis pas ça par copinage, sinon je dirais rien. Préparez vos agendas pour 2014.

Et sinon, quoi de neuf, mon bon Justin ?


J'ai adoré l'expo Ron Mueck (j'avoue que je ne m'y attendais pas ! Quoi ? Subjugué par des productions hyperréalistes ?). J'ai bien aimé les expos Chagall et Braque (j'ai en tête une douzaine de purs joyaux). J'ai vu et adoré Lost in Translation (comment ça : il serait temps ? J'avais détesté Somewhere, de la petite Coppola !). J'ai adoré un spectacle d'une troupe belge, (Peeping Tom), mais c'était à la rentrée — y a prescription. Ça vient de passer à Séoul ; c'est bête, vous l'avez loupé. L'expo d'art brut "Absolument excentrique"  à l'Hôtel de Ville est Absolument remarquable. Ça repose de l'art con-ceptuel.
Je viens de passer Avenue de France, dans le 13e à Paris. Y avait un beau panorama, avec des toits et du vent. C'est foutu, Vinci et Bouygues sont passés par là : ils bouchent le ciel ! Un peu plus loin, j'ai même vu une entreprise (derrida-ienne sans doute, et diablement post-moderne) de démolition et de… "déconstruction" !
Tant pis : j'irai regarder les beaux petits poissons chez Truffaut.

Chers faux-lohoueurs de Mies et de Veaux, n'oubliez pas cependant que :

La fermière préfère la chaise aux bancs.

Votre dévot ami.