30 janvier 2008

Près des remparts de Séville



(Photos JC)






"Près des remparts de Séville
Chez mon ami Lillas Pastia,
J'irai danser la séguedille
Et boire du Manzanilla !"








"Ce que le public te reproche, cultive-le, c'est toi"
, conseillait Cocteau.
D'aucuns me reprochent le côté narcissique de ce blog.
Je persiste et signe donc !




















Et me voilà à Séville ce week-end, où j'ai découvert l'Amérique.
Cette ville est absolument délicieuse, et personne ne m'avait rien dit !
L'Alcazar est une pure merveille et n'est même pas en première page des guides !
Quant à la cathédrale, elle mesure 1000 m de haut, 3 km de long et comporte 114 nefs ! (Comment ça, j'exagère ? Puisqu'on vous dit : c'est la plus grande !)
Bien sûr, pas une vitrine ni un troquet qui n'affiche quelque part un Jésus endolori ou une Sainte-Vierge les yeux dans l'eau… Et le moindre retable dégouline de 15 tonnes de fioritures invraisemblables d'or ou d'argent… Mais comme dit Sarko-bling-bling, c'est bien sur la religion catholique que se fonde notre civilisation, non ?



















Et puis surtout, voilà des gens qui passent la moitié de l'année à assassiner des taureaux dans des souffrances épouvantables et cependant grandioses, mais qui sont d'un affabilité et d'une gentillesse jamais démentie en quatre jours, du caissier du Museo de Bellas Artes (Ach, Murillo !) au serveur de tapas en passant par le piéton rêveur de l'Avenida de la Constitución ! Tous souriants et courtois ! (Allez, il est bon de balancer des généralités de temps en temps…)
Ce pays est moderne, comme dit mon ami Jipé ! De fait, j'y ai vu des gens extrêmement civilisés. Par exemple, on peut griller des cigarettes dans la plupart des cafés et beaucoup de restaus sans aller en prison. Sans exagérer, bien sûr, — on n'est pas des mal élevés ! Et personne ne s'est évanoui en faisant "Pff pff" d'un air dégoûté. Point de Christina Boutinos ! Personne n'est mort non plus. Notre taxi a brûlé au moins trois feux rouges, ce matin, et les ouvriers travaillent sans casque mais en chantant. Le soleil y est pour beaucoup, il faut le reconnaître.

Chante aussi le chanteur de flamenco. Dans le flamenco, y en a un qui souffre et l'autre qui s'énerve dans sa robe à pois. Le guitariste, lui, pose un pied sur la cuisse et gratte des deux mains. C'est la danse du diable et des amours souffrantes.

Et puis, il y a quand même les cuisses de caille à l'escabèche, le jamón au porc ibérique nourri aux glands et le fabuleux salmonjero (sur fond d'azuleros, bien sûr)…

Pardon aux spécialistes et aux connaisseurs de l'España, mais Candide vient de découvrir l'Andalousie, et c'est pas triste !

"— Tais-toi, je t'avais dit de ne pas me parler !
— Je ne te parle pas, je chante pour moi-même,
Je chante pour moi-même
Et je pense… Il n'est pas défendu de penser !"



Devinette :
Jeune anarchiste tchèque ?

Réponse : L'Amour
("L'amour est enfant de Bohême, il n'a jamais jamais connu de lois")

Merci à Prosper Mérimée, à Meilhac et Halévy, à Bizet et à Aireuropa.

Vive les jeunes anarchistes tchèques !

Votre dévoué,
Amigo dévoto

Post-scriptum
J'étais tellement de bonne humeur que j'avais oublié la partie ronchon qui fait mon charme. Elle concerne les progrès considérables du service aux clients sur les compagnies aériennes :

1. Dans l'avion, faut payer pour grignoter un sandouiche, maintenant ! Les jolies traditions se perdent, et on ne t'offre même pas un café ! Le chiffre ! Le chiffre !
2. Sur ma facture, il y a un "supplément carburant" !!!
Bientôt, ce sera un supplément "augmentation du prix du plastique des sièges" ou "changement des vérins sur l'aile droite" ou "prime de l'hôtesse" ! Le chiffre !
3. Généralisation de la surréservation. T'as pas intérêt à être le dernier de la file, à l'enregistrement des bagages, à moins de vouloir récupérer un peu de fric au noir… Remarque, c'est un p'tit boulot, ça…

Résultat, tu voyages moins cher. Faut seulement participer à la gestion de la compagnie. De la cogestion, en quelque sorte. Moderne. Sarkozyen. Je propose une franchise incompressible dès que tu passes commande d'un voyage.

17 janvier 2008

Giacometti : sa peine pâle soûla Soutine





























Comme on me reproche parfois de n'être trop souvent ici qu'un sinistre atrabilaire, j'ai décidé de vous livrer cette fois-ci du positif et du poilant.
Vous n'échapperez point pour commencer au traditionnel bêtisier de l'année écoulée…

Le Grand Bêtisier 2007
(vous allez rire) :

— C'est Ségolène Royal qui est désignée pour représenter le PS aux élections présidentielles !!!
— Nicolas Sarkozy est élu président de la République…
— Les privilégiés, responsables de la faillite de la France, ne sont ni à Neuilly ni en Suisse, mais dans les gares…
— Jacques Attali, grand expert de la nation, recommande pour faire baisser les prix… de favoriser encore l'implantation des grandes surfaces !
— Not' président tombe amoureux d'un ex-mannequin et décide de se marier dans les semaines qui suivent…

Tiens, à propos, Carla offre des Rolex à son homme, mais elle a une frangine assez géniale, Valéria Bruni-Tedeschi, dont le premier film s'appelait "IL EST PLUS FACILE POUR UN CHAMEAU…" fondé sur une parole des évangiles (Mt 19, 24, Lc 18, etc.), "Il est plus facile à un chameau de passer par le chas d'une aiguille que pour un riche d'entrer au royaume des cieux", thème du film, donc : comment peut-on être riche sans culpabilité ?

Petites gourmandises
plus ou moins frugales


CELUI QUI FAISAIT DES TRUCS TOUT MAIG'S :
L'ATELIER DE GIACOMETTI À POMPIDOU 

L'expo de 2001 (les dessins), à force de râcler les fonds de tiroir, donnait trop à voir et pas toujours du plus passionnant.
Mais aujourd'hui c'est autre chose : le parcours proposé permet une belle rencontre avec toutes les facettes de l'un des artistes les plus importants du XXe siècle. Depuis les portraits que faisait de lui enfant son peintre de père, aux silhouettes minimalistes qu'on connaît, en passant par ses copies de maîtres, ses périodes cubiste et surréaliste, les photographies, la reconstitution d'un coin d'atelier… Peu de panneaux pédagogiques : on est plutôt dans l'immersion, fascinés par cette étrange et parfois glaçante vision du monde, étonnés notamment par ses productions d'avant-guerre.
C'est que les artistes de ce temps-là, monsieur, avant de dézinguer le réel avec leur prisme perso (je t'en foutrais, moi !) étaient passés par l'humble et académique apprentissage du métier… Et que ce nécessaire passage (à 16 ans, Picasso peignait comme Vélasquez) leur donne pour moi la légitimité d'en "découdre" avec l'art de leur temps. (Foudiou, quelle phrase ! Je me surprends toujours, moi)
Bref, les conceptuels ignorants pourraient aller prendre des leçons devant "l'Objet invisible" (1934), "Le Nez" (1947-1965) ou quelques silhouettes microscopiques et en faire leur miel…
Et vous, mes fidèles abonnés qui passez par Paris, y aller aussi jeter un œil avant le 11 février.

ÇUI QUI PEIGNAIT DES BŒUFS ÉCORCHÉS :
SOUTINE

Pendant que vous y serez, passez donc place de la Madeleine, après avoir acheté vot' caviar chez Fauchon, c'est juste à côté. Mélangez Chagall, Van Gogh et Edvard Munch (une pincée de Bacon), secouez, ouvrez les yeux : il y a des merveilles chez ce Soutine-là. Attention, c'est fort.

PAR ÇUI QU'A FAIT LE FILM "L'ESQUIVE" :
LA GRAINE ET LE MULET

Comme dit Sab : "Mais qu'est-ce qu'il leur est arrivé, aux critiques ?"
Une histoire de bons sentiments ?
Si "L'Esquive" était une pure merveille de poésie et d'intelligence, devant "La Graine et le Mulet" je ne partage point tout à fait l'enthousiasme de certains.
Arrête, j'essplique.
Abdellatif Kechiche fait partie de ces rares réalisateurs qui, d'une situation quotidienne banale, savent tirer du jus d'universel. Pas que du poétique ou de l'humanisme à deux balles, non : sa petite histoire d'un vieil ouvrier viré qui lance un restau Couscous-poisson (graine, mulet) sur une vieille carcasse de bateau, il en fait par moments une vraie tragédie grecque. Et Slimane courant à petits pas derrière la mobylette des voleurs, et itou le ventre rond de la fille qui danse… c'est beau comme de l'antique. C'est ce qui fait la différence entre l'art et le cochon, justement : la transcendance (du ventre) (tiens, je perds la forme, moi).
Seulement — question de rythme personnel ? — j'avoue avoir regardé ma montre (c'est une image). Et franchement, il y a au moins deux scènes d'hystérie absolument (j'allais dire : objectivement) insupportables et qui n'en finissent pas… J'avoue avoir cherché mes bouchons à oreilles. Mais ce mec est génial. Mais le film est long. Mais il y a des moments éblouissants (comment fait-il pour filmer un simple repas de famille comme ça ?). Mais les péripéties sont prévisibles. Mais ça n'a guère d'importance. Oh et puis je ne sais plus . Allez donc le voir vous-même. Je vous préviens : ça dure 2 h 31.
Pour ceux qui veulent entendre le contraire, rendez-vous sur le site des Cahiers du Cinéma.

NATIONALISATIONS DES CHAINES PUBLIQUES :

Ça va coûter cher ! Pour trouver de l'argent, quelqu'un a trouvé une solution : virer Delarue !



Et n'oubliez pas :
La sauvageonne a apprécié mes cailles, une fois dessoûlée !
(Merci à Joël Martin in La Bible du Contrepet, Robert Laffont éd.)



Votre ami dévot