28 juillet 2006

Festival d’Avignon : ce que Théâtre veut dire...

Ils sont nombreux, les festivals, à Avignon. Qu’est-ce qui permet de les distinguer ?
Pour schématiser abusivement, prenons les deux extrêmes :

A un bout, t’as les beaufs. Ils sont cons, fringués comme l’as de pique, ils bouffent des frites ordinaires sur les grandes terrasses à touristes et campent à la Barthelasse. Naturellement, ils fréquentent le festival off, et en particulier, les usines à comiques.
A l’autre bout, t’as les bobos. Ils sentent bon, ils ont le t-shirt (noir) bien repassé, ils sortent de l’hôtel de la Mirande, ils tiennent des conversations élevées avec la bouche en cul de poule sur le théâtre contemporain et le petit cairanne de propriété qu’ils ont découvert. Bien sûr, ils ne fréquentent que le «in», qui est le vrai festival. Avec des places à 36 euros (Cour d’honneur).

Extraits de conversation :

François-Xavier : — Vraiment troublant, ce personnage de la petite ouvrière, comme ça, qui est heureuse de travailler, même dans une usine d’armement ! C’est toute la contradiction du monde, on en est tous là, je veux dire. Et le sacrifice de cette mère, qui jette son enfant du 9e étage pour sauver l’entreprise. C’est Médée, c’est la tragédie, je veux dire, enfin, comme ça, enfin. (François-Xavier est de gauche)

Roro :
— On s’est bien marré, hier soir. Oh ! ça casse pas trois pattes à un canard, mais au moins c’est pas prise de tête. Avec Germaine on aime bien le théâtre alors on vient tous les ans. Demain on ira quand même voir Bartabas, il paraît que c’est superbe.

Problème : Bartabas n’est pas dans le «off». Alors ça alimente les commentaires condescendants des happy few éclairés qui parlent de concession au «grand public». Quant à déplacer ces happy few vers le off, inutile d’insister. D’ailleurs ils ne viennent pas à Avignon «in» pour découvrir des créations (dont la plupart seront reprises à Paris), mais pour être les premiers à les avoir vues.

Entre le pur bidochon et le pur bobo il y a naturellement toute la gamme, de l’amateur exigeant qui a cassé sa tirelire pour découvrir de grandes choses, au journaliste spécialisé, un peu blasé, qui cherche vainement du qui-décoiffe (y en a qui vont se reconnaître), en passant par l’habitant qui se régale de voir sa ville sortir de son ordinaire torpeur ; comme toujours, l’enseignant, qui constitue un important pourcentage du public de théâtre ; le journaliste local, un peu dépassé, qui recopie le dossier de presse. Et Jacques Nerson.

Que de théâtres !

Quant à moi, dès que j’ai un moment, je vous parlerai de ce que j’ai vu (dans le in et dans le off : je n’ai jamais réussi à me positionner, entre Roro et François-Xavier)

Vive l’été !

13 juillet 2006

L'Affaire du Coup de boule : Où est l'Homme ?

Je crains d'avoir été mal compris lors de ma dernière chronique ("J'ai trop les nerfs"), citant avec ironie le geste de Zidane et le commentaire de Nanar.
Scandalisé par le coup de boule qui ressemblait à un suicide en direct, j'ai d'abord considéré qu'à ce niveau de professionnalisme, il était tout bonnement impardonnable.
Et puis, comme tout le monde, j'en ai appris les circonstances, la provocation inacceptable de Matterazzi (qui d'ailleurs semble assez rompu à ce genre d'exercice, mais il n'est pas le seul nous dit-on). Or, les paroles peuvent tuer… Sur un court de tennis, ça ne serait sans doute pas passé inaperçu mais là, avec tout ce monde qui fait rien qu'à crier,… pas entendu pas pris !
Et puis quand même vraiment Zizou est un mec sympa, et ses explications ce soir sur Canal + étaient intelligentes et pondérées. Quand on tient un génie du foutchebôl, on prend le bonhomme avec.
C'est humain, donc. Comme dit Nanar : "une réaction d'homme".
Ah oui ?
"Nique ta mère" ou "Ta soeur est une pute", on entend ça dans une cour de récré. Si tu réponds à ce genre de provoc naze, c'est vraiment que tu joues toi aussi dans la cour de récré. "Une réaction de gamin" ?
Un "psy du sport" (qui en profitait pour essayer de placer ses stages anti-stress) proposait sur iTélé de travailler sur "l'intelligence émotionnelle" des sportifs.
C'est pas si sommaire que ça en a l'air. On est étonné qu'à ce niveau nos joueurs soient encore dupes de ce genre de provoc à la gomme ! D'un côté comme de l'autre d'ailleurs — c'est tout aussi crétin du côté du provocateur…
C'est peut-être parce que ce sont de grands artistes, et à ce titre entiers, engagés, réactifs…
C'est plus seulement la vidéo qu'il va falloir sur les stades de foutchebôl (j'adore cette prononciation !), c'est des micros spéciaux, des canons à son !

Où est l'Homme ?

12 juillet 2006

J’ai trop les nerfs

Enfin ! Enfin les sommets sur le Service Privé ! Je regarde «L’Ile de la Tentation» et je ne peux réprimer mon enthousiasme. Voilà quatre couples de jeunes gens à fort potentiel médiamétrique sommés de se tromper les uns les autres avec le gratin des défilés de mode pour camping quatre étoiles. Ils sont beaux, elles sont belles, elles et ils vont souffrir, c’est beau comme de l’antique. Trop fort. Extraits :
«Il va le payer c’est sûr». «C’est la nuit de tous les dangers». «J’ai trop les nerfs». «Nous les filles on se soutient alors que eux ils bavent sur les filles».
Ah on est loin de la vulgarité du coup de boule zidanesque : ce qui se joue ici, c’est la subtile alchimie cornélienne du devoir contre le désir, avec le destin au-dessus suspendu sous les traits de l’animatrice aux cheveux tirés, la représentante du Grand Tout téèffien qui dit : «J’ai une mauvaise nouvelle pour vous…»
Ach ! To be jaloux or not ! Resisting at the tentation or not ! Entre nous ce serait dommage qu’il ne se passât point d’émoustillantes rencontres. J’ai peur. Leurs larmes sont déjà si belles, dès le premier épisode. Que sera-ce au douzième ? Déjà, Bataille et Fontaine, Cauet, nous avaient entraînés sur des cimes, j’en passe des Michaël Young et des meilleurs, jusqu’où iront-ils ?
Leur aventure est un exemple pour la jeunesse : l’Emotion pure, la Beauté des corps, la Spontanéité si touchante, allez, foin des pisse-triste qui vous parlent de perversité malsaine, de masochisme débile, de bidonnage voyeuriste ! Vive le sain ressentiment, la salvatrice hargne, le coup de boule viril, le coup de griffe irrépressible ! Après tout ils ont vingt ans ! Vive Bouygues !
Avant-hier, JP Pernot a interviewé Lorie sur la finale. Et Nanar Tapie qui connaît la vie nous a expliqué que le pétage de plomb de Zidane, c’était une «réaction d’homme». Que demande le peuple (enfin : celui qui boit du Coca-Cola) ?

La vie est belle.

01 juillet 2006

Cher service public

L'autr' jour je vas sur le site de France 3. J'me dis "Chouette, y a un test de QI, un test de culture générale, bonne idée, quiens, j'vas m'amuser. Alors je clique. Pis j'm'aperçois qu'c'est payant. 3,99 ou 6,99 c'est selon. Mince, que j'me dis, j'ai pas cliqué sur un site commercial ! France télévisions rachète des animateurs à prix d'or, fait une rente de situation à des producteurs comme Delarue et a pas les moyens de proposer un p'tit quiz sympa à ses usagers (pardon : clients) ???????"
J'écris un courriel protestatoire et je vais sur la Foire Aux Questions (Frequently Asked Questions), et là que lis-je ?

"Certains utilisateurs s'insurgent effectivement contre le fait que nos tests interactifs soient payants. La valeur ajoutée de ce service est réelle : le contenu est pertinent car il a été réalisé par des professionels dans les disciplines concernées […] Ce tarif fait suite à une étude de marché réalisée par l'agence eConseils auprès de 1765 répondants en juin 2001. "

"Valeur ajoutée"… "Pertinent".… "Etude de marché"… Oh lala, ils causent comme ces cadres d'une grande entreprise que j'ai animés récemment. Ça sent l'école de commerce, ça sent la logique comptab'e, ça exhale un joyeux parfum de modernité, c'est-à-dire de libéralisme, nouveau nom du capitalisme et de la philosophie marchande. J'suis pas crypto-marxiste, mais bon, comme dit Roro, mon copain du Café du commerce, France-télévision, c'est nous qu'on la paye (avec les impôts et les produits qu'on achète qui financent la publicité, je parle même pas de la redevance).
– Consommateur-payeur, il dit, Roro. Maintenant qu'il faut raquer pour avoir la bonne école, la bonne clinique, maintenant que selon l'endroit oùsque t'habites tu vas payer l'eau plus ou moins cher, qu'on pense à faire payer les routes nationales, on n'est plus dans une logique d'égalité ou de solidarité, qu'il dit, Roro, on est dans un monde mondialisé de "Plusque t'en as, plusque t'en as."
Il exagère, Roro, non ?
Moi je trouve qu'on vit une époque formidable.

P.S. : Comme j'ai pas encore fait une "étude de marché" pour évaluer la "pertinence" de la "valeur ajoutée" de mon blog, il est encore gratuit. Profitez-en. Faites-en profiter vos amis.

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O lala le temps passe

A peine le temps de me retourner depuis mon dernier commentaire, mince, on ne parle déjà plus de Clearstream, ni du CPE, ni de la grippe aviaire. Mon blog a pris un sacré coup de vieux, le temps passe vraiment de plus en plus vite !

Et comme j'ai fait d'autres choses et que j'ai eu quelques soucis informatiques, je n'ai même pas pu parler de la privatisation du monde, de la tendance cul, de l'expo Godard que j'avais vu parmi les premiers, ni du Palazzo Grazzi…

Prochainement sur votre écran !